Dieu m'étonnera toujours
EAN13
9782918135722
ISBN
978-2-918135-72-2
Éditeur
Éditions Dialogues
Date de publication
Collection
Littératures
Dimensions
21,2 x 13,8 x 1,8 cm
Poids
240 g
Langue
français
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Dieu m'étonnera toujours

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Éditions Dialogues

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Une femme se retire (pourquoi ?) dix jours en août dans un monastère de la Chartreuse abandonné par les moines et qui accueille des laïcs. Dans la chaleur de l’été, quasi nue et chaussée des grandes bottes de jardinage masculines dénichées dans l’atelier, elle met ses pas dans les pas du Chartreux, entreprend de nettoyer son jardin en friche, évolue comme chez elle dans la maison de l’ermite absent dont, épousant la manière de vivre, elle s’éprend peu à peu. Tout regard et tout ouïe, elle médite, plus qu’elle ne se perd en oraisons, et note, ivre de splendeur inattendue, ce qui lui passe par la tête. Ahurissement, vénération, sentiment aigu de la nature, de l’amour, du temps, de Dieu (elle se dit qu’Il n’est jamais où on L’attend et qu’Il a plus d’un tour dans son sac). Elle écrit l’incorrigible balancement de ses impressions, les pensées contradictoires, les idées folles qui l’assaillent dans un lieu strictement soumis à la règle monastique. Elle pense au monde. Un an plus tard, reprenant ces « suites pour le temps qui passe », la femme celte et panthéiste retrace avec autant de fantaisie que de rigueur, au fil d’une prose entrecoupée de poèmes brefs dans l’esprit du haïku, un séjour intemporel et divinement païen à la Chartreuse.
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Commentaires des lecteurs

Conseillé par
11 avril 2013

Le petit arpent de l'amour.

Récit d'une dizaine de jours de ce que l'auteur qualifie de "Grève du monde"! Huis-clos bucolique et jardinier, mais un livre dont il est très difficile de parler tant il est personnel. Un ermitage, c'est la demeure d'un ermite, la ...

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Notice par Claire Fourier

Claire Fourier
Dieu m'étonnera toujours. Suites pour le temps qui passe
Editions Dialogues, 2013

La ménagerie humaine, — elle nous soûle. L'immédiat, — il nous gonfle. On n'en peut plus. Un peu de transcendance, de beauté, de noblesse, de poésie, de sacré ! De l'oxygène ! Respirer ! Aimer !
On a tous rêvé de larguer les amarres un moment. On n'ose pas ou l'on ne peut pas. J'ai pu. À l'écart du monde, on sent s'élargir l'angle de vue. On entrevoit ce qui est susceptible de donner de la hauteur au monde. Dieu ? J'ai été une enfant croyante. Adulte, j'ai changé mon fusil d'épaule : je considère que c'est à Dieu de croire en moi. Au vrai, c'est la "réévaluation des valeurs" dont parle Nietzsche que favorise le séjour dans un ermitage. On y est saisi par l'idée que Dieu est une qualité (et une quantité) de lumière dans notre regard.
À mon retour dans le siècle, si j'avais sauté des péripéties, le cirque était exactement le même. Mais j'avais changé. L'ombre tutélaire d'un Chartreux m'avait-elle "réellement" fait l'amour ?
J'ai hésité à publier ce carnet de voyage intérieur, initiatique. Peur d'éventer un mystère. J'ai cédé à une exigence intime : mettre les autres en face de ce dont ils crèvent et de ce à quoi ils aspirent. J'ai tenté de donner un nom à ce que nous recherchons tous confusément.
Ce livre m'a écrite plus que je ne l'ai écrit. Peut-être Dieu m'étonnera toujours lira-t-il le lecteur plus que le lecteur ne lira le livre, et le lecteur s'en trouvera-t-il mieux, — plus joyeux ? Peut-être aura-t-il envie de s'attarder avec une lumière que lui aussi aura accepté de reconnaître ?
Claire Fourier


Interview de Claire Fourier

Interview de Claire Fourier

Se retirer pour fuir « la course insensée du monde », faire « la grève du monde », « la grève du siècle », « la grève des gens ». Se retirer dix jours dans un monastère, un besoin vital ?
Oh ! oui. Échapper à la ménagerie humaine : elle nous soûle ! Se dérober au grouillement obscène des événements et non-événements : il nous ronge tel un acide et nous rétrécit ! Fuir la course en roue libre du monde : elle est un nœud coulant pour la pendaison ! Refuser le diktat de l’information : son bourdonnement nous gonfle ! Dire non aux loisirs vulgaires : ils nous sucent la moelle ! Un peu de noblesse, de sacré, de poésie ! De l’oxygène ! De la fantaisie ! Respirer ! Aimer ! Descendre en soi pour ensuite émerger dans un élan salvateur et (enfin) rayonner !… On rêve tous de larguer un moment les amarres. Mais on ne peut ou n’ose pas. J’ai pu le faire. Alors je témoigne pour ceux qui ne peuvent pas. — Si le mot d’ordre de Stéphane Hessel fut : « Indignez-vous ! », le mien serait plutôt : « Récupérez-vous ! »

Rapidement, vous chaussez les bottes du Chartreux, vous pensez à l’homme, vous l’imaginez. « Aimer Dieu et la Vierge, c’est bien beau, mais… » Vous en riez, de ces sentiments et désirs naissants pour l’être absent. Comment le spirituel se lie-t-il ici au sensuel ?
J’étais femme dans la maison d’un homme. Je dormais nue dans le lit clos du Chartreux (chaleur du mois d’août), je mangeais à sa table devant la fenêtre et les sapins, faisais le ménage dans sa cellule, évoluais dans son atelier de menuiserie, nettoyais son jardin. Comment ne pas penser à lui physiquement ? Où que l’on aille, on y va avec son corps ! À cause de la beauté qui émanait du lieu et du mode de vie, je me suis éprise de l’homme à qui j’emboîtais le pas. L’ombre tutélaire du Chartreux m’a-t-elle fait l’amour ? Oui ! Inutile d’appuyer. Suggérer ! L’érotisme c’est le corps ardent qui monte à la tête, la féconde, y dépose une semence de beauté (la pornographie, c’est l’encéphalogramme plat)… Et réfléchissons. L’ouverture des bras du Crucifié ! Sa tête doucement penchée ! Son corps affaissé ! Le sang à son flanc ! Quiconque ne sent pas la sensualité de cette posture est indigne du : « Prenez et mangez, car ceci est mon corps ! », du « Prenez et buvez, car ceci est mon sang ! »… Puis les iris bleus, les fraisiers que l’athlète de Dieu avait plantés, les allées bordées de tessons de tuiles roses, la douceur de l’air, les nuances de la lumière au fil des heures dans le jardin et la forêt au loin, tout avait un parfum d’érotisme délicat… C’est ainsi qu’un soir d’orage, je me suis mise à danser sous la pluie, pleine de gratitude pour je ne sais quoi, amoureuse de tout ! Ramenée à Chateaubriand et aux splendeurs exprimées dans Le Génie du christianisme, je cédais sans savoir à Qui ou à quoi je cédais. Ce faisant, j’étais à jamais affranchie des conventions moralisatrices qui réduisent l’imagination et stérilisent la réflexion.

Dans ce récit, Claire Fourier, vous apportez des respirations poétiques grâce aux haïku. Était-ce une évidence à l’écriture de ce livre de mêler les deux formes littéraires ?
Dans d’autres livres déjà j’ai tressé le poème et la prose. Ce texte-ci, fondé sur l’émerveillement, appelait particulièrement la poésie. Le poème condense, cristallise ce que la prose vient de développer. C’est une respiration dans la prose, et c’est une larme de lumière posée sur l’ombre allongée de la phrase. Le haïku, forme japonaise brève de trois versets, imagé, concret, cadencé, se prête à cela (il m’a toujours plu, il m’est familier depuis de longues années). Les Chinois aussi ont associé prose et poésie au XVIIe siècle. Et pas seulement les Orientaux !... Occidentaux, nous avons oublié que notre littérature la plus ancienne, nordique, nouait déjà le poème et la prose : telle fut la poésie scaldique. — Au vrai, jamais la poésie n’a été aussi nécessaire qu’aujourd’hui. Elle est la fille sauvage, fulgurante et fraîche de la Providence. Finaude, elle ridiculise les discours de Tartuffe. Fragile, elle abat les forteresses du mensonge politique. Musicale, elle fait honte — mine de rien — aux tambours médiatiques. Écorchée vive, elle dérange l'autosatisfaction morale. Déliée, elle libère la bouche bâillonnée… Cela dit, la poésie une manière d’être, un style de vie avant d’être une forme littéraire.

"Dieu m’étonnera toujours", écrivez-vous. Vous alliez à sa recherche, qu’avez-vous trouvé ?
De quoi chercher encore !.. Qu’est-ce que Dieu ? Dieu, c’est l’inexplicable. Or, plus on explique, plus il reste d’inexpliqué. J’appelle Dieu cet inexpliqué qui toujours recule. D’où que je me suis surprise à dire Amen à l’occasion des offices (seuls moments vécus en commun à la Chartreuse). Amen : ainsi soit-il : je me rends, débordée par la noblesse et la supériorité de ce qui m’entoure et que je ne comprends pas… En allant à la Chartreuse toutefois, je ne découvrais pas la vie religieuse : j’ai été une enfant croyante. Adulte, j’ai changé mon fusil d’épaule : je considère que c’est à Dieu de croire en moi — ou à moi de Le faire advenir ?... L’époque croit pouvoir éradiquer Dieu et le sacré. Elle n’y parviendra pas, et c’est tant mieux : l’homme a besoin de transcendance. Quant au Christ, il est pour moi le modèle absolu de l’être humain : modèle de douceur, de tendresse et d’offrande. Jésus est divin — à force d’être humain. J’ai mûri longuement l’idée, et j’y reste attachée, que la divinité est la finalité de l’homme.

À la lecture de votre livre, on ressent cette impression d’être dans une bulle, dans un temps arrêté, où seuls comptent les mots, les phrases, vos lignes. Aviez-vous cette même conscience d’un temps plus lent, plus juste lors de ces quelques jours de retraite ?
Étais-je dans une bulle ? Enfilant les bottes de jardinage laissées là par le Chartreux (du 43, moi qui fais du 37), j’ai chaussé des bottes de sept lieues et arpenté le ciel, — lequel est tout sauf une bulle ! C’est le monde au loin qui était une bulle. Disons : j’étais dans une bulle légère qui en crevait une autre, lourde, disloquait le Cylindre « dépeupleur » décrit par Beckett et qui enferme les gens dans une immédiateté sans issue. J’étais dans une bulle qui dissolvait radicalement le boulet de nullité que dans le monde nous traînons à nos pieds. Je soufflais ce boulet comme fétu de paille ! Impression merveilleuse. Dedans était dehors, et vice versa. Toutes les valeurs chaviraient. Les choses dites grandes devenaient petites, les petites grandes. Somme toute, le séjour dans un ermitage favorise la « réévaluation des valeurs » prônée par Nietzsche. Mais il est vrai, cela est possible grâce à la longueur de temps et à la patience dont La Fontaine a bien dit qu’elles font plus que force ni que rage. L’ermite laisse au siècle la force et la rage. J’ai fait de même dix jours durant. — Je crois que dans le monde séculier on a peine à imaginer l’ouverture d’esprit, la liberté faramineuse, l’immensité intérieure que l’on ressent dans un ermitage. On est ici saisi par l’idée, aiguë mais souple, que Dieu est une qualité (et une quantité) de lumière dans le regard, — qui devient kaléidoscopique et plein de reflets.
J’ose dire que mon livre m’a écrite (et continue de m’écrire) plus que je ne l’ai écrit. Peut-être mes pages liront-elles le lecteur autant que le lecteur les lira ? Peut-être en partagera-t-il la drôlerie, la fantaisie, la jubilation, et nouera-t-il mieux mélancolie et allégresse ? Peut-être aura-t-il envie de s’attarder avec une lumière qu’il aura accepté lui aussi de reconnaître ?


Claire Fourier nous parle de son livre Dieu m'étonnera toujours (éditions Dialogues) dans l'émission Dialogues littéraires, réalisation : Ronan Loup.

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